Ne le dis pas.
Tiens, d'un secret je veux t'instruire;
Moi j'ai peur de l'écho: je parlerai tout bas;
L'indiscret pourrait redire;
Il faut, petit ami, qu'il ne m'entende pas.
Ecoute: du rosier la feuille fugitive
Tombe et s'envole en murmurant:
La feuille fait du bruit, je serai moins craintive;
Le bruit m'a rassurée, et je tremble pourtant.
Qu'un secret fait de mal quand on n'ose l'apprendre !
Il semble qu'un lien l'attache sur le cœur.
Vois! Mon regard te parle, il est plein de douceur:
Dis-moi donc, mon ami, ne peux-tu le comprendre ?
Il était prêt à se trahir,
Le secret que devrait t'expliquer mon silence:
Il s'échappait. Timide en ta présence,
Ma bouche se referme et n'ose plus s'ouvrir.
Bien tendrement la tienne a dit je t'aime !
Lorsque ce mot si doux fut prononcé par toi,
Méchant, c'est mon secret que ta bouche elle-même,
Comme un écho du cœur, t'a révélé pour moi.
Tu le connais, et peut-être parjure,
Un jour, hélas! tu le décèleras:
Petit ami, je te conjure
Si tu le sais, ne le dis pas.
Elisa Mercœur (Décembre 1825)
Élisa Mercœur a été trouvée enfant abandonnée sur le seuil de l'Hospice des orphelins de Nantes, le 27 juin 1809 à 22 heures. Un papier est retrouvé dans le berceau avec cette explication :
« Élisa, née le 24 janvier 1809, non enregistrée aux actes civils. Le ciel et la douce humanité veilleront sur elle. Ses parents seront peut-être, assez heureux pour pouvoir la réclamer un jour ».
Trois ans plus tard, sa mère qui est brodeuse se présente à l'orphelinat pour la récupérer.
Élisa est une enfant prodige, à 10 ans elle a déjà lu Shakespeare, Boileau. Elle écrit ses premières poésies à 11 ans.
Elle connait dès cet âge le latin, le grec, l'anglais l'espagnol.
À seize ans, Élisa publie dans le journal de Nantes, le "Lycée Armoricain", des vers qui reçoivent un accueil très flatteur.
Dans ses œuvres poétiques ressortent des sentiments chrétiens, à la fois romantiques et classiques mais parfois également païens.
Elle devient une habituée des salons littéraires parisiens et s'attire les louanges de Lamartine, Musset, Hugo, Chateaubriand. Lamartine disait d'elle : "…cette petite fille nous dépassera tous tant que nous sommes".
Atteinte d'une affection pulmonaire, elle décède à Paris, le 7 janvier 1835, dans les bras de sa mère, à l'âge de 26 ans.
Commentaires
Qu'en termes jolis, cette déclaration d 'amour fut faite. Florentin
Joli poème, bon mercredi et bon milieu de semaine
Bsr....
Un superbe ecrit ,bravo
Bne soirée bisou